La sélection de Donc Acte !

Donc Acte ! ne suit pas l'actualité cinéma à la loupe. Donc Acte !, qui s'est intitulé Le cinéphobe pendant une courte période, n'a pas pour passe-temps de visionner des pelloches de cinoche. Donc Acte ! ne va pas souvent voir une œuvre en salles. L'envie est rare. Le plaisir est d'autant plus intense lorsque je suis satisfait par une rencontre du 7ème art. Certains films m'inspirent des réflexions ; c'est ce que je souhaite partager. Je ne propose pas de thèses et il m'arrive de gâcher les histoires en racontant la fin. Vu que je ne mets pas ce qui a été fait de l'invention des frères Lumière sur un piédestal et que je suis des fois moqueur, Donc Acte ! peut ne pas plaire.

samedi 14 avril 2012

Tout est pardonné

Tout ou presque tout, puisque certaines surprises font rire plutôt que pleurer

Tout est pardonné, Mia Hansen-Løve, 2007, France.

Tout est pardonné est le premier long-métrage d'une ancienne critique de Les cahiers du cinéma, de Mia Hansen-Løve qui a donc construit son récit de façon très schématique. Le film est divisé en 3 parties. Les 2 premières se concentrent sur la présentation et la dépression de l'homme dans le couple. C'est grâce à ces surprises et à un traitement raisonnable de ce détachement, vu que le début ne promet qu'une anodine histoire d'un couple en appartement, que Tout est pardonné gagne en densité au fur et à mesure des 50 premières minutes.

Les parties 1 et 2 présentent donc un type mystérieux, un de ces sombres individus aux yeux clairs qui a tout l'air d'être torturé de l'intérieur (un beau gosse qui affiche continuellement un air mesquin et moqueur), qui a vu tout ce qu'un écorché vif a vu (son visage est marqué par le creux de ses joues, sa peau est légèrement fripée, ses cheveux sont décoiffés et ses lèvres sont pulpeuses) et qui fait rêver tomber les femmes en pâmoison parce qu'il a grand besoin d'amour (et de 2 mains pleines qui couvrent ses 2 joues creuses). Victor est un de ces types qui m'a fait penser immédiatement à un gus à la dèche qui suce pour avoir une dose de crack. Je dois avouer quelque chose : j'habite un quartier difficile classé ZEP avec utilisateurs de crack, dealers, prostituées, 2 gangs, des clandestins, des fréquentes descentes de police, des bagarres, des cris et des coups de feu dans la nuit ... donc mes références sont quelque peu particulières. Quand je vois un individu avec une bouche en cul de poule et des yeux azurs, moi, je pense "voilà un camé qui suce." C'est le territoire qui veut ça. Et je suis désolé de vous offrir un bout de ma pensée au passage.

J'avais repéré le drogué à sa gueule à 10 kilomètres à la ronde ...

Cet élément dérangeant est devenu certain pendant la vision du début de Tout est pardonné car le protagoniste Victor est bien un usurpateur de vie. Il se drogue et, en plus, est infidèle. Pas blasé pour un sou, j'avais donc raison. J'avais suivi ce petit classique des mésententes sur fond de drogue dans le cadre d'un couple austro-parisien-bobo-branché dont l'épouse éprouve toute la compassion et le désespoir du monde pour le père torturé et pique-assiette de son enfant Pamela. Et 50 minutes excellentes de film passent ...


... et j'avais raison


... Et la partie 3 arrive. Beaucoup moins réussie que les précédentes : la faute à allouer à un scénario qui use d'un fumeux coup de théâtre et à une jeune actrice pourtant prometteuse (disons plutôt que j'aimerais la voir réussir tellement Constance Rousseau est mignonne, à voir dans Un monde sans femmes, Guillaume Brac, 2011) qui, dans Tout est pardonné, a pour tout atout d'actrice de rouler des yeux à chaque moment de doute ou d'émotion.

La conclusion gâche totalement ce long-métrage. Je vous la décris. C'est poilant à souhait.

Une dizaine d'années après la séparation de ses parents, Pamela se renseigne sur le sort de son père qu'elle n'a pas vu depuis autant d'années. Sa tante, si je me souviens bien, l'informe que Victor est sorti de désintoxication et qu'il a repris une vie normale. Retrouvailles en petite forme et départ en vacances plus tard, Pamela entretient une relation épistolaire avec Victor. Le montage alterné et une musique douce jouée à la guitare acoustique soulignent que ces instants d'écriture et de lecture des lettres sont une source de bonheur pour les 2 apparentés qui se retrouvent dans une joie toute retenue mais sincère. Vous voyez le topo. Tout le monde est aux anges. Et Pan ! Coup de théâtre ! Inattendu ! Pas d'amorce ! Pamela lit une des lettres de son père et ... sur un cut sans pitié, Pamela se recueille devant le cercueil de son papa. Et je rigole. Et je ne saurai jamais ni pourquoi ni comment ni qui de quoi. Je n'ai même pas pu recoller les morceaux après coup. Rien n'est expliqué par la suite. A noter : Pamela a pardonné à son pater.


Une mort inattendue !

Je dirais même plus : "Une mort surprenante !"

Tout est pardonné est intéressant pendant la description de près d'une heure d'un couple dont l'homme suit une pente descendante et est trucidé sur sa fin par son auteur. C'est dommage. Le drame était présenté en délicatesse et se conclue sur un gros tour de passe-passe de conteur de dernière zone. C'est sûr, la mort peut parfois surprendre : surtout l'annonce de la nouvelle. Ça ne fait pas d'une telle annonce la productrice d'un effet plus interpellant que cela. Ça ne produit pas de peine ni de chagrin. Juste une grosse coupure, une suite de questions sur les raisons de l'événement ... et un énorme rire concernant le procédé technique cinématographique.

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